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Loi 12/2023, du 24 mai, relative au droit au logement (Ley para el Derecho de acceso a la Vivienda).

 

Aperçu complet de la loi 12/2023 : le droit au logement en Espagne

La loi 12/2023 du 24 mai relative au droit au logement (Ley para el Derecho de Acceso a la Vivienda), Cliquez ici pour consulter la loi , marque un tournant important dans l’approche de l’Espagne en matière de réglementation du logement.

Cette loi, qui est entrée en vigueur le 26 mai 2023 après avoir été publiée au Journal officiel de l’État (BOE), introduit des changements importants visant à garantir le droit au logement tel qu’il est inscrit dans la Constitution espagnole.

Malgré les critiques considérables formulées par divers acteurs du secteur immobilier, cette loi instaure de nouvelles réglementations en matière d’expulsions, de taxation des logements vacants et de contrôle des loyers, et introduit de nouvelles incitations fiscales pour les propriétaires.

 

Aspects généraux de la loi

La loi sur le droit au logement représente la première réglementation nationale complète axée sur le droit au logement depuis l’adoption de la Constitution espagnole. Sa mise en œuvre marque une étape importante dans la réglementation du logement en Espagne, car elle aborde un large éventail de questions, allant des procédures d’expulsion aux responsabilités des grands propriétaires fonciers.

Un aspect important de la loi est son caractère interventionniste, qui a suscité la controverse. Elle représente une intervention claire du gouvernement central dans des domaines traditionnellement gérés par les communautés autonomes espagnoles (CCAA). Historiquement, le logement et l’urbanisme relèvent de la compétence de ces gouvernements régionaux. Cependant, cette loi établit un cadre qui impose des règles et des lignes directrices spécifiques que les communautés autonomes doivent respecter, centralisant ainsi certains aspects de la réglementation du logement.

En outre, la loi intervient également dans le secteur privé, en particulier dans les relations entre les particuliers en matière de droits de propriété et d’accords contractuels. Elle impose des limitations et des conditions qui affectent la manière dont les particuliers peuvent exercer leurs droits de propriété et de contrat, reflétant ainsi le rôle plus large des autorités publiques dans la garantie du droit constitutionnel au logement.

 

Objectifs de la loi

Les principaux objectifs de la « loi 12/2023 » sont les suivants :

1. Réglementer les droits et devoirs des citoyens

La loi définit les droits et les responsabilités des individus en matière de logement, garantissant à tous les citoyens l’accès à des conditions de vie décentes et adéquates.

2. Faciliter l’accès au logement

La loi vise à rendre le logement plus accessible, en particulier pour les personnes et les familles en difficulté économique. Elle vise à garantir que les logements soient fonctionnels, sûrs et répondent aux normes de vie de base.

3. Planification et programmation du logement par l’État

La loi jette les bases de la planification nationale du logement, y compris la création et la gestion du parc immobilier public.

4. Régime juridique du logement public

Elle réglemente la gestion et l’attribution des logements publics, en veillant à ce que ces ressources soient utilisées efficacement pour répondre aux besoins de la population.

5. Promotion de la diversité des types de logements

La loi encourage le développement de différents types de logements afin de répondre à différentes formes de mode de vie et aux besoins sociaux.

6. Renforcement de la protection dans les transactions immobilières

La loi introduit des mesures visant à améliorer la transparence et la sécurité des transactions d’achat et de location de logements, en protégeant les droits des acheteurs, des locataires et des propriétaires.

 

Par exemple, elle introduit l’obligation pour les vendeurs de fournir TOUS les documents juridiques et administratifs nécessaires à la vente du bien immobilier, tels que :

  • Certificat d’habitation
  • Certificat attestant que le bien immobilier est libre de toute pénalité et amende
  • Confirmation que le bien immobilier a passé avec succès les inspections de construction
  • Copies des actes et accords de la communauté des propriétaires, et des normes applicables

 

Principales mesures introduites par la loi

La loi 12/2023 introduit plusieurs mesures qui ont des implications immédiates et à long terme pour le marché immobilier espagnol. Il s’agit notamment des mesures suivantes :

1. Obligation de fournir des données sur les logements

Les propriétaires et les intermédiaires sont désormais tenus de fournir des données complètes sur les biens immobiliers et leurs propriétaires. Cette mesure vise à accroître la transparence des transactions immobilières et à garantir que toutes les parties aient accès aux informations essentielles.

2. Nouvel indice de référence pour les augmentations de loyer

Un changement important est la création d’un nouvel indice de référence qui remplacera l’indice des prix à la consommation (IPC) dans le calcul des augmentations de loyer. Cette mesure vise à stabiliser les prix des loyers et à protéger les locataires contre des hausses soudaines et importantes.

3. Taxation des logements vacants

La loi introduit la possibilité de taxer les logements vacants afin d’encourager leur occupation et de réduire le nombre de biens immobiliers inutilisés. Cette mesure s’inscrit dans le cadre d’un effort plus large visant à remédier à la pénurie de logements et à garantir une utilisation efficace du parc immobilier existant.

Si ces mesures entrent en vigueur immédiatement, d’autres dispositions, telles que le plafonnement des loyers et la désignation de zones locatives « sous pression », dépendront des actions des communautés autonomes et pourraient nécessiter des procédures et des conditions supplémentaires.

 

Mesures en vigueur

Certaines des mesures de la loi sur le logement qui sont déjà en vigueur comprennent :

1. Limitation des augmentations de loyer

Depuis mars 2022, l’IPC n’est plus la référence standard pour les révisions de loyer. Jusqu’au 31 décembre 2023, les augmentations de loyer pour les contrats existants ne peuvent dépasser 2 % par an. En 2024, cette limite passera à 3 %. À partir de 2025, un nouvel indice des loyers sera introduit par le gouvernement espagnol, qui servira de référence pour les futurs ajustements de loyers.

2. Informations obligatoires dans les transactions immobilières

Les intermédiaires immobiliers doivent désormais fournir des informations détaillées sur les biens immobiliers et leurs propriétaires lors des transactions d’achat et de location. Ces informations comprennent la situation économique, les permis d’occupation ou les certificats d’habitabilité, les caractéristiques essentielles du bien immobilier et l’identité du vendeur ou du bailleur. Le non-respect de ces exigences peut entraîner des sanctions financières.

3. Prolongations exceptionnelles des contrats de location

La loi introduit une prolongation obligatoire d’un an des contrats de location lorsque les locataires peuvent démontrer une situation de vulnérabilité sociale et économique. Cette prolongation est particulièrement importante lorsque le propriétaire est classé comme grand propriétaire.

4. Surtaxe IBI pour les logements vacants

La loi autorise les municipalités à imposer une surtaxe sur la taxe foncière (IBI) pour les logements inoccupés depuis plus de deux ans. Cette surtaxe peut atteindre 150 % et s’applique aux propriétaires possédant au moins quatre biens immobiliers résidentiels, sauf en cas de raisons justifiées pour l’inoccupation.

Ces mesures visent à réguler le marché du logement, à contrôler les loyers, à améliorer la transparence des transactions et à encourager l’occupation des logements vacants.

 

Logements protégés et incitatifs

La loi traite également des « logements protégés » (Vivienda Protegida) et des « logements abordables incitatifs ». Les logements protégés sont soumis à un régime de protection publique permanente, avec des exceptions autorisées uniquement dans des circonstances spécifiques. La vente ou la location de ces biens immobiliers nécessite l’autorisation préalable de la communauté autonome correspondante.

En ce qui concerne le logement abordable incitatif, les autorités publiques sont habilitées à promouvoir la disponibilité de ce type de logement et à appliquer des limites de prix afin de garantir son accessibilité aux personnes défavorisées sur le plan économique. Ces mesures visent à augmenter l’offre de logements abordables et à soutenir les personnes dans le besoin.

 

Paiements électroniques et grands propriétaires

La loi met fin à la pratique du paiement du loyer en espèces et exige que les loyers soient payés par des moyens électroniques, sauf dans les cas où l’une des parties n’a pas accès à ces moyens. Ce changement vise à accroître la transparence et à réduire les risques de litiges liés au paiement.

La loi définit également la notion de «grand propriétaire», en identifiant les personnes physiques ou morales qui possèdent plus de dix biens immobiliers urbains ou une superficie construite supérieure à 1 500 mètres carrés à usage résidentiel. Cette définition peut être adaptée par les communautés autonomes dans les zones déclarées comme marchés résidentiels sous tension, ce qui peut inclure les propriétaires de cinq biens immobiliers ou plus dans ces zones.

 

Responsabilité des frais d’agence immobilière

En vertu de la nouvelle loi, la responsabilité du paiement des frais d’agence immobilière incombe au propriétaire. Cette modification vise à réduire la charge financière des locataires et à garantir que les propriétaires supportent les coûts liés à la location de leurs biens immobiliers.

 

Renforcement de la protection contre les expulsions

La loi introduit des modifications importantes aux procédures d’expulsion, de saisie immobilière et de vente aux enchères immobilières, en particulier dans les situations impliquant des locataires vulnérables. Ces modifications comprennent :

1. Protection renforcée pour les locataires vulnérables

La loi étend la protection aux locataires en situation de vulnérabilité, en veillant à ce que les procédures d’expulsion et de saisie tiennent compte de la situation du locataire.

2. Suspension des procédures d’expulsion

Une période de suspension de deux mois pour les personnes physiques et de quatre mois pour les personnes morales est instaurée pour les procédures d’expulsion, afin de donner aux locataires un délai supplémentaire pour trouver un autre logement ou résoudre leurs difficultés financières.

3. Exigences supplémentaires pour les grands propriétaires

La loi impose des exigences supplémentaires pour les demandes d’expulsion introduites par les propriétaires de grands logements, en particulier lorsque le bien immobilier en question est la résidence principale d’un locataire vulnérable.

4. Médiation et conciliation

Dans les cas où le locataire se trouve dans une situation vulnérable, la loi exige qu’une procédure de conciliation ou de médiation soit engagée avant que la procédure d’expulsion puisse se poursuivre.

Ces mesures visent à offrir une meilleure protection aux locataires en situation de vulnérabilité et à garantir que les procédures d’expulsion se déroulent de manière équitable et humaine.

 

Déclaration de zones résidentielles en situation de tension

La « loi sur le logement » introduit également la notion de « zones résidentielles en situation de tension ». Ces zones sont identifiées sur la base de critères spécifiques, tels que la forte demande de logements, la hausse des loyers et le manque de logements abordables. Une fois qu’une zone est déclarée en situation de tension, une série de mesures peuvent être mises en œuvre pour remédier aux déséquilibres du marché du logement, notamment

1. Contrôle des loyers dans les zones en situation de tension

Dans les zones déclarées en situation de tension, les limites actuelles d’augmentation des loyers (2 % en 2023, 3 % en 2024) resteront en vigueur. À partir de 2025, un nouvel indice des loyers sera introduit afin de plafonner les augmentations de loyer.

2. Prolongations exceptionnelles des contrats

Les locataires des zones en situation de tension peuvent demander une prolongation exceptionnelle de leur contrat de location pour une durée maximale de trois ans après l’expiration de la durée initiale, sous certaines conditions. Les propriétaires doivent accepter cette prolongation, sauf accord contraire ou si le bien est nécessaire à leur usage personnel.

3. Conditions spécifiques pour les nouveaux contrats

Les nouveaux contrats de location dans les zones en difficulté seront soumis à des conditions spécifiques selon que le propriétaire est un petit propriétaire ou un grand propriétaire. Pour les petits propriétaires, le loyer ne pourra pas dépasser le dernier loyer du contrat précédent, avec une augmentation possible de 10 % dans des cas spécifiques. Pour les grands propriétaires, le loyer sera plafonné en fonction des contrats précédents ou du prix maximal fixé par des indices de référence.

4. Responsabilité des frais d’entretien

Dans les zones en difficulté, les propriétaires et les locataires peuvent convenir que les frais d’entretien généraux sont à la charge du locataire. Toutefois, si une telle clause n’était pas incluse dans le contrat précédent, elle ne peut être ajoutée au nouveau contrat.

 

Incitations fiscales

La loi 12/2023 introduit plusieurs incitations fiscales visant à encourager les propriétaires à proposer des logements abordables dans les zones en difficulté. Ces incitations, qui entreront en vigueur le 1er janvier 2024, comprennent :

1. Réduction de 90 % du rendement locatif net

Les propriétaires qui réduisent les loyers de plus de 5 % dans les zones en difficulté peuvent bénéficier d’une réduction de 90 % du rendement locatif net à des fins fiscales.

2. Réduction de 70 % dans des cas spécifiques

Une réduction de 70 % est accordée pour les premières locations dans des zones défavorisées lorsque le locataire est âgé de 18 à 35 ans ou lorsque le bien est loué à une administration publique ou à un organisme à but non lucratif à des fins de logement social.

3. Réduction de 60 % pour les biens réhabilités

Les biens immobiliers qui ont fait l’objet d’une réhabilitation au cours des deux dernières années peuvent bénéficier d’une réduction de 60 % du rendement locatif net.

4. Réduction de 50 % dans les autres cas

Une réduction générale de 50 % s’applique dans les autres cas, accordant un allègement fiscal aux propriétaires qui se conforment aux exigences de la loi.

Ces incitations fiscales visent à encourager les propriétaires à participer à l’offre de logements abordables et à soutenir les objectifs généraux de la loi sur le logement.

 

Surtaxe IBI pour les propriétés inoccupées

La loi autorise les municipalités à imposer une surtaxe sur la taxe foncière (IBI) pour les propriétés qui restent inoccupées pendant plus de deux ans sans motif valable. Cette surtaxe peut atteindre jusqu’à 50 % du montant net de la taxe et peut être portée à 100 % si la propriété reste inoccupée pendant plus de trois ans. Cette surtaxe vise à dissuader les propriétaires de laisser leurs logements vacants et à encourager l’utilisation du parc immobilier existant.

 

Réserve foncière

La loi impose que des terrains adéquats et suffisants soient affectés à des usages productifs et à l’aménagement résidentiel, une partie étant réservée à des logements soumis à des régimes de protection publique. Cette exigence garantit la disponibilité de terrains pour la construction de logements abordables, favorisant ainsi la cohésion sociale et répondant au besoin de diversité des options de logement.

La loi précise qu’au moins 40 % de la surface constructible résidentielle dans les nouveaux projets d’urbanisation et 20 % dans les terrains urbanisés en cours de réforme ou de rénovation doivent être réservés à des logements protégés. Cette mesure vise à garantir une répartition équilibrée des logements abordables et à prévenir la ségrégation sociale dans les zones urbaines.

 


Conclusion : l’impact de la loi 12/2023 sur le marché immobilier espagnol

La loi 12/2023 représente une réforme complète et profonde du marché immobilier espagnol. Ses dispositions abordent un large éventail de questions, allant du contrôle des loyers et de la protection des locataires à la promotion de logements abordables et à la taxation des propriétés vacantes. Si cette loi a suscité la controverse, en particulier parmi les professionnels de l’immobilier et les propriétaires fonciers, elle marque également une avancée significative vers la garantie du droit au logement pour tous les citoyens.

Au fur et à mesure de sa mise en œuvre, son impact sur le marché immobilier deviendra plus clair. L’introduction de nouvelles réglementations, d’incitations fiscales et de mesures de protection pour les locataires vulnérables devrait remodeler la dynamique du marché immobilier espagnol, avec des implications tant pour les propriétaires que pour les locataires.

Pour les acteurs du secteur du logement, qu’ils soient propriétaires, investisseurs ou locataires, il sera essentiel de comprendre les dispositions de la loi 12/2023 et ses implications afin de s’y retrouver dans le paysage évolutif du logement en Espagne. En tant que première loi nationale réglementant le droit constitutionnel au logement, elle crée un précédent qui influencera probablement l’élaboration des lois et des politiques futures en Espagne.